Grandir sans patrie. Lucia Ibanez Marquez, psychanalyste- janvier 2016

Par Les invités de Mediapart

Édition : Déchéance de nationalité : pour qui? Pour quoi? Selon Lucía Ibáñez, psychanalyste, «Il y a des droits qui ne devraient poser question à personne, comme une évidence limpide de ce qu’une société se doit d’offrir à ses enfants (…). L’inscription d’un enfant au droit social par l’attribution de la nationalité pourrait être une des conditions fondamentales pour grandir subjectivement, mais aussi pour grandir à plusieurs en société».  

Notre société s’apprête à l’initiative du gouvernement à inscrire dans la constitution une différence de traitement, basée sur la filiation, pour des personnes condamnées pour acte de terrorisme. Le projet de révision constitutionnelle envisage la déchéance de la nationalité des binationaux, c’est-à-dire des français disposant d’une autre nationalité.

Plusieurs voix se sont déjà élevées pour dénoncer l’aberration et le danger que cette proposition gouvernementale pourrait inscrire au sein de notre constitution en vidant de son sens la devise fondatrice  d’égalité qui stipule un droit égalitaire pour tous les français. Si cette mesure est adoptée, un français condamné pour terrorisme sera déchu de sa nationalité française et sera expulsé du pays. Mais tous les autres, condamnés pour les mêmes actes de terrorisme, nommés abusivement français de souche, et qui ne sont pas en nombre moindre, d’après les statistiques, resteront dans le pays et garderont leur nationalité.

Le gouvernement reconnaît que cette mesure n’aura pas d’incidence sur la lutte contre le terrorisme, mais qu’il s’agit d’un message symbolique. Mais ce message symbolique n’a pas été formulé, quel est-il et à qui s’adresse t-il ?

A une société apeurée et émue marquée par le deuil et la violence ? A notre jeunesse ? Avec quelle perspective ou celle de la désagréger davantage ? A nos enfants ? Comment soutenir devant leurs interrogations que désormais notre société fera une distinction, par la punition, entre des Français qui ont un père ou une mère d’une autre nationalité ? Quel enfant pourrait comprendre une telle inégalité de la justice ?

S’il est attendu, étant donné le contexte, que le gouvernement propose des mesures sécuritaires, il est incompréhensible qu’il ne propose pas à la société les moyens pour penser les questions de fond soulevées par la radicalisation et permettre d’élaborer des mesures qui nous aident, avec la participation de tous les citoyens, à soigner nos blessures et à dépasser nos difficultés ensemble.

C’est de notre responsabilité de penser aux conséquences d’une telle mesure instaurée comme inégalité constitutionnelle. Tout d’abord, elle permettra l’expulsion du condamné dans le pays de parents ou de grands parents où il n’a pas grandi. Mais pourquoi irait-il dans un pays qui lui est étranger alors qu’une des terres du « califat » pourrait l’accueillir, avec encore plus de facilité dans son programme de désubjectivation, tout en l’aidant à nourrir  la haine pour le pays de sa naissance qui l’aura expulsé ?

Une société qui refuse d’interroger ce qu’elle engendre, encourt à fortiori le risque que cela lui fasse retour, d’une manière ou d’une autre.

L’insistance du gouvernement à faire voter une telle mesure est d’autant plus incompréhensible qu’il est impossible de supposer qu’elle provienne de son ignorance sur la complexité du problème auquel il dit vouloir s’attaquer. Au lendemain de l’attentat sur Charlie, le gouvernement commandait à Malek Boutih, député de l’Essonne, une étude approfondie sur « L’analyse et la prévention des phénomènes de radicalisation et du djihadisme en particulier ». Mr. Boutih a rendu son rapport fin juin 2015. Cette étude rigoureuse qui porte le titre: « Génération radicale » a sollicité la participation des hommes et des femmes de terrain du milieu socio-éducatif et pénitentiaire travaillant avec des enfants et des jeunes. Ce document mériterait de  devenir une base de travail sérieuse pour l’élaboration des propositions  qui pourraient répondre aux difficultés soulevées. A l’inverse, ce document semble être resté dans un tiroir sans que le gouvernement s’en soit servi au moins, pour offrir largement à la population l’information richissime qu’il contient et qui aiderait chaque citoyen et chaque citoyenne à prendre conscience de la complexité de la question de la radicalisation qui s’étend dans notre société.

Le rapport fait le portrait « d’une génération au bord de la rupture » qui trouve dans l’offre djihadiste une réponse, certes illusoire et mortifère, au désespoir subjectif de jeunes fragilisés et en rupture avec la société dans laquelle ils vivent.

Le phénomène touche toutes les catégories sociales. Certes il y a les jeunes marginalisés habitants des banlieues mais il a aussi tous ces autres jeunes appartenant à des classes moyennes ou supérieures. « On compte une majorité de moins de 25 ans (65%). La tranche d’âge des 18-25 ans est la plus concerné et s’y ajoute 5% de mineurs ».

Le rapport s’attarde à avertir sur le danger de basculer dans un phénomène de masse étant donné « l’ampleur du phénomène et sa pénétration dans tous les milieux, avec la radicalisation de jeunes étudiants et de jeunes filles en particulier » qui constituent, avec des jeunes diplômés,  des cibles privilégiées pour la stratégie de recrutement djihadiste. Certaines compétences les intéressent davantage : « infirmières, artificiers, sportifs, ingénieurs ».

Ne nous trompons pas, nos jeunes qui basculent dans le terrorisme ne sont pas tous des religieux avec des grands parents maghrébins. Ils constituent dans leur diversité, notre jeunesse française. Ils sont nés sur le sol français, ils ont grandis sous nos lois, sous nos programmes d’éducation, sous nos projets territoriaux, sous nos principes et valeurs culturelles et sur nos choix de société adoptés par tous et devant lesquels chacun est responsable.

A qui donc voudrions-nous faire porter la responsabilité de nos déceptions et de nos défaillances ? (1)

Je voudrais contribuer au débat actuel sur la question de la nationalité en déployant une problématique soulevée par l’application de la règle du droit du sol qui reste largement méconnue des français et qui mérite, me semble t-il, de trouver place dans le débat.

Si nous avons des jeunes dits binationaux, c’est surtout parce que la France impose aux enfants issus de l’immigration la double nationalité.

En effet l’idée socialement répandue que chaque enfant né en France même de parents étrangers serait automatiquement Français grâce à l’application du droit du sol, n’est pas juste. Il n’y a pas d’affectation immédiate de ce droit et de ce fait les parents sont contraints de donner leur propre nationalité à l’enfant. Je vais m’employer dans les lignes qui suivent à déployer cette affirmation et la problématique qu’elle soulève.

Que dit la règle du droit du sol?

Le texte en vigueur sur la nationalité différencie l’attribution de la nationalité française de l’acquisition de celle-ci.

L’attribution est fondée sur le droit du sang en reconnaissance de la filiation : « Est français l’enfant, dont l’un des parents au moins est français au moment de sa naissance » et cela même si l’enfant naît à l’étranger.

Quant à l’acquisition, elle implique une procédure. Il est possible de devenir Français, par mariage, par adoption, et par la demande volontaire de naturalisation. Je ne m’arrêterai pas sur ces situations qui n’intéressent pas mon propos et je vais reprendre ce que dit la loi plus précisément quant au droit du sol pour les enfants nés en France de parents étrangers.

Le droit du sol (jus soli)  a été introduit dans le droit français en 1515 par un arrêt du parlement de Paris qui stipulait : « est français celui qui est né en France, même de parents étrangers, s’il demeure dans le royaume.» (2)

En 1804, le code civil conserve le droit du sol, tout en privilégiant  la filiation du sang. Il apparaît déjà l’obligation pour l’individu né d’un étranger, de réclamer la nationalité française dans l’année suivant sa majorité. Ce délai sera supprimé par la suite, pour qu’à partir de 1851 le droit du sol soit progressivement rétabli pour répondre aux besoins croissants de travailleurs ou de soldats en 1889. Il est intéressant de remarquer que durant cette période de préoccupation militaire, la faculté de répudier la nationalité française avait été interdite (3) pour pouvoir assujettir au service militaire les enfants d’étrangers nés en France.

« En 1993, la loi n°93-933 du 22 juillet, dite loi Pasqua-Méhaignerie, restreint l’accès à la nationalité par le droit du sol pour les jeunes d’origine étrangère. Pour devenir Français, ces derniers doivent désormais, selon les termes de la loi, en manifester clairement la volonté entre 16 et 21 ans». (4)

La législation actuelle qui date de 1998 (loi du 16 mars nº 98-170), dite loi Guigou, a modifié certaines dispositions de la loi Pasqua, en  retirant notamment l’obligation pour le mineur de faire une demande officielle de volonté pour devenir Français.

Aujourd’hui, la nationalité française est déclarée de plein droit en raison de la naissance et de la résidence, mais octroyée sous certaines conditions. Trois possibilités sont envisagées :

  • Lorsque l’enfant a 13 ans, ses parents peuvent la réclamer pour lui, et avec son consentement.  Ils doivent faire une déclaration,  et fournir des documents qui attestent que l’enfant réside en France depuis l’âge de 8 ans et pendant une période consécutive de cinq ans.
  • Dès l’âge de seize ans, le jeune peut réclamer la nationalité par déclaration et sans l’accord des parents. (Article 21-11 du code civil)
  • A 18 ans le jeune devient Français de plein droit, sauf s’il décline cette possibilité. (Article 21-7 du code civil)

Dans les deux derniers cas, l’accès à la nationalité reste dépendant de deux conditions : le jeune devra prouver 5 années de résidence consécutives à partir de l’âge de 11 ans et ne pas avoir été condamné à une peine égale ou supérieure à six mois d’emprisonnement, non assortie d’une mesure de sursis.

Avant la loi Guigou, l’enfant n’avait droit à aucun document attestant de sa futurenationalité française. Il portait nécessairement, comme encore aujourd’hui, la nationalité du père ou de la mère.

Depuis 1998 (Décret n° 98-721 du 20 août) l’enfant a droit à  un Titre d’Identité Républicain (TIR) pour pouvoir voyager à l’étranger et être dispensé de visa à son retour en France. Le TIR est délivré sur demande et doit être accompagné, de toute façon,  d’une carte d’identité ou d’un passeport, documents que la France ne peut pas délivrer à l’enfant, puisqu’il n’est pas assimilé encore Français.

De ce survol historique de l’évolution de la loi jusqu’au texte en vigueur, je tiens à relever qu’il y a eu une époque où le droit du sol s’appliquait dès la naissance, pour évoluer ensuite, en fonction des intérêts ou des positions idéologiques des partis au pouvoir, vers une exigence de déclaration de volonté ou de réclamation souhaitée d’un droit par le jeune.

Ce qu’il faut retenir de l’application de la législation actuelle et qui intéresse mon questionnement, c’est que durant toute son enfance et jusqu’à ses 13, 16 ou 18 ans, l’enfant aura affaire à ce statut bizarre d’être considéré potentiellement Français. Ceci semble une aberration qui me permet d’affirmer qu’en France le statut d’étranger se transmet de père à enfant. Cette situation qui crée une sorte d’entre deux est assez problématique. D’abord parce qu’elle n’offre pas à l’enfant un point d’appui solide sur lequel s’appuyer pour construire sa propre historialité en la dégageant de l’histoire de migration des parents. Et ensuite parce que la définition de la loi semble méconnaître, et donc ne pas tenir compte, des besoins psychiques de l’enfant impliqués dans le processus de construction et de différenciation identitaire et dont le besoin d’appartenance au milieu social qui l’entoure est un point d’ancrage essentiel.

Et puis, comment ignorer que l’amour pour la patrie et pour la terre germe durant l’enfance ?

Et comment espérer d’un jeune adolescent la « déclaration d’une volonté » affirmée pour devenir membre à part entière d’une société qui l’aura considéré étranger durant toute son enfance en créant ainsi avec lui un lien teinté d’ambigüité ?

Pour avancer dans le développement de cette problématique, je dois rappeler brièvement les prémisses impliquées dans la construction de la subjectivité et de l’espace identitaire où se fabrique et s’organise sans cesse pour quelqu’un, l’appréhension de sa réalité interne et du monde qui l’entoure. Le petit enfant baigne dès sa naissance, et même avant, dans les eaux langagières et culturelles des parents. Dans ce lieu familial, il entendra les premiers signes qui lui feront appréhender le monde externe avec curiosité et envie, ou bien, avec crainte et méfiance.

La construction, par l’enfant, d’un reflet de mêmeté (5) identitaire dépend de sa rencontre avec l’amour des parents, ce qui passe par la langue et par la manière dont ils ont pris soin de son corps. La langue est le lieu d’ancrage singulier qui signe, en même temps, l’ancrage dans le monde.

A l’école, l’enfant aura l’opportunité de rencontrer d’autres enfants, et pour certains, elle sera le lieu de rencontre avec une autre langue, la langue sociale qui lui permettra d’accéder à un monde bien plus grand que celui de la famille. L’école est aussi le lieu où, par les jeux de miroir que facilite la langue, les enfants approchent avec conscience les marques de leurs différences. La curiosité pour l’autre semblable les amène à se comparer et à se mesurer, ce qui est évidemment structurant. C’est la langue qui fera lien, un lieu d’habitation commun, même si  chacun l’habitera à sa façon. La langue devient patrie, riche de son pouvoir d’enracinement identitaire à une culture. Et lorsque les enfants grandissent dans un bilinguisme culturel, cela est sans doute une richesse mais parfois aussi une confrontation bouleversante et conflictuelle.

Pour certains d’entre eux, le pays d’origine des parents sera source d’un imaginaire imprégné de nostalgie pour la terre perdue et qui sera, d’autant plus idéalisée, que les parents ne reviendront pas au pays natal, mais garderont présente la perspective rêvée d’un retour. Ce rapport ambivalent des parents affecte leur relation avec le nouveau monde social qui les entoure et la façon dont ils vont le présenter à l’enfant.

Une des premières tâches psychiques à accomplir pour l’enfant sera celle de créer sa propre possibilité, (ce qui peut être celle d’une création symptomatique)  pour faire avec la fragilité des parents, pris dans la douleur du déracinement et par leurs propres conflits subjectifs.

C’est bien pourquoi, à partir de sa circonstance familiale, mais aussi pour répondre à la pression psychique d’appartenance sociale, l’enfant cherche, dans le meilleur des cas, d’autres lieux d’adresse, des espaces qui lui fournissent d’autres figures d’identification.

La société, à la place de tiers est celle qui peut assurer pour l’enfant une fonction structurante de coupure séparatrice que je nommerai la fonction  paternelle du social. Cette fonction est porteuse du symbolique par l’écart qu’elle peut signifier avec la condition, quelle qu’elle soit, des parents et par la reconnaissance de l’histoire qui serait celle de l’enfant, en lien et en rupture avec celle des parents. Le message symbolique pourrait se traduire ainsi : tu viens d’un père et d’une mère (reconnaissance de la filiation ancestrale) mais tu es né parmi d’autres qui t’accueillent dans la terre et la langue que nous parlons.

Si cette fonction fait défaut à l’enfant, un lien souffrant s’établit entre lui et les pays de son histoire, ceux des parents et le sien, sans vraiment se sentir appartenir ni à l’un ni à l’autre.

Le conflit identitaire est terrible : « je ne suis pas de là bas » la terre des parents, mais « je ne suis pas des vôtres » non plus.  Il reste être de nulle part. Mais pour un enfant, être de nulle part est foncièrement déstructurant. En manque d’ancrage identitaire à la société dans laquelle il est né, l’enfant grandit dans sa communauté, en marge des autres, portant un vide identitaire.

Et lors du passage adolescent, qui n’est pas linéaire, et que d’ailleurs certains n’arriveront à traverser qu’en y laissant leur peau, le jeune se trouve dans le besoin structurant de contester la loi des parents pour affirmer, souvent par opposition, son droit à la singularité. C’est une époque éminemment sensible et fragile où la question de l’origine se repose avec puissance et dangerosité.

Confus et perdus par le brouillement de miroirs déchus ou idéalisés et n’ayant parfois que le désespoir pour survivre, certains jeunes vont chercher un peu de structure en appartenant à une communauté sectaire pour suppléer à leur manque d’assise identitaire. Ils succombent à un discours qui fait appel à l’obéissance et à la soumission, au nom d’un Dieu-Maîtrequi sait et qui prescrit les commandements pour guérir du mal de vivre. Nous avons à nous interroger sur la défaillance de certaines réponses sociétales qui tombent à côté de l’appel que ces jeunes nous adressent.

De plus, l’adolescent qui se vit en marge de la société trouvera dans le discours ambiant de quoi nourrir un sentiment d’exclusion. Des slogans comme : « Être Français, ça se mérite », ou « la carte d’identité n’est pas la carte orange » imprègnent la langue du rejet de l’autre sans que cela ne cesse de réveiller le démon de la haine. (6)

Toni Gatliff dans son dernier film « Geronimo », met bien en scène la problématique du vide identitaire. Il filme des jeunes issus de l’immigration turque et gitane résidant dans une banlieue du sud de la France, entourés par le trafic de drogue, pris par la violence et surtout plongés dans l’ennui et l’oisiveté sans espoir. La troisième génération, les adolescents, sont prêts à mourir et à tuer pour sauver l’honneur de la tradition, une tradition qu’ils n’ont connue que par la voix des grands parents. Et alors que les parents  avaient tenté de s’en dégager, elle fait retour, avec plus de puissance, chez les jeunes qui se sont saisis d’elle pour l’ériger en patrie. Faute de lien solidaire à une société qui ne les reconnaît que dans leur marginalité, la tradition exacerbée devient pour eux le pater : la patrie des pères.

Le malaise subjectif et social des jeunes interpelle la société, par le biais du politique, dans sa capacité à garantir, pour eux, sa fonction de tiers social. Notre société française l’assume en reconnaissant à chaque enfant le droit à l’école et le droit à la santé, deux lieux qui lui assurent une inscription et une protection sociale. Mais chaque société devrait pouvoir assumer la responsabilité d’accueillir tout enfant qui naît sur sa terre en le reconnaissant comme un sujet social à part entière et cela dès la naissance. Légitimer cette reconnaissance  par le droit serait bien un message symbolique de cohésion sociale adressée à toute la société. Evidemment cela ne saurait suffire pour protéger les enfants du malaise, il y a bien d’autres circonstances qui y participent, la ségrégation territoriale, la pauvreté et « l’apartheid scolaire » (7) qui reproduit les inégalités et la désolidarisation des jeunesses qui grandissent en parallèle sans perspective sociale à construire et à partager.

Il y a des droits qui ne devraient poser question à personne, comme une évidence limpide de ce qu’une société se doit d’offrir à ses enfants, les conditions  suffisamment bonnespour que chacun puisse devenir citoyen en cultivant la tolérance et la curiosité pour l’inconnu. L’inscription d’un enfant au droit social par l’attribution de la nationalité pourrait être une des conditions fondamentales pour grandir subjectivement, mais aussi pour grandir à plusieurs en société, en créant du lien qui ne se fonde pas sur la stigmatisation de l’étranger, mais qui reconnaisse d’emblée la valeur du partage de la vie et de la langue au sein de nos différences.

Les mythes originaires construits autour de la question : « d’où je viens ? » se fondent sur les liens d’appartenance à une famille et à une société. Ceux-ci sont pour l’enfant des points d’ancrage, des bords, pour qu’un jour il puisse les lâcher et partir pour construire sa propre famille et parvenir à se trouver un bout de terre quelque part dans le monde.

En adoptant des lois qui créent des inégalités, nous nourrissons le rejet et la violence sociale et cela porte à conséquence sur l’ensemble de la société.

(1) Cela me fait penser à une personne qui voulait renvoyer sa fille adoptée à son pays d’origine, parce qu’elle s’est aperçue qu’elle ne répondait pas à son idéal d’enfant qu’elle attendait.

(2) In Droit du sol, Wikipedia

(3) Christophe Vimbert, La tradition républicaine en droit publique français, P.U.R., p34

(4) Melting-post.fr, publication de Génériques, association spécialisée dans l’histoire et la mémoire de l’immigration, la sauvegarde, la préservation et l’inventaire des archives de l’immigration en France et en Europe.

(5) Françoise Dolto emploi ce terme pour définir le narcissisme comme un lieu où s’entrecroisent les premières relations langagières, l’image inconscient du corps et le désir.

(6) Lors d’un discours à Grenoble en 2010, Nicolas Sarkozy avait déjà différencié les Français d’origine étrangère du reste de la nation et proposait de retirer la nationalité française à toute personne d’origine étrangère qui porterait atteinte à la vie d’une personne dépositaire de l’autorité publique.

(7) « L’apartheid scolaire, Enquête sur la ségrégation ethnique dans les collèges », Seuil, 2005, Titre du livre du Georges Felouzis, sociologue, son travail sur les inégalités à l’école dénonce l’éclatement du système éducatif sur une base de ségrégation ethnique.